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 19 février 2025

Pour une Église synodale : communion, participation, mission

Il ne s’agit pas stricto sensu d’un compte rendu du livre, mais d’une conférence que j’ai donnée à un groupe de la cathédrale de Grenoble. L’objectif était de commenter le document final du synode sur la synodalité. On peut donc penser qu’il s’agit d’un compte rendu de lecture...

Ma surprise fut de découvrir que les assistants n’avaient pas lu le document ! Ce qui a rendu la tache un peu plus ardue.

Je vous invite donc à le lire, (le document...) il est disponible en librairie si vous préférez la version imprimée, ou bien en ligne : Document final du Synode en PDF ou ici sur le site de la CEF en html : https://eglise.catholique.fr/synode-des-eveques-2024-sur-la-synodalite/557463-document-final-de-la-xvie-assemblee-generale-ordinaire-du-synode-des-eveques/

Ce ne sont que des notes... Le style n’est pas très littéraire...
Dans le texte : évêque = "évêque de Grenoble", Mgr Eychenne


Rappel : 2nde session du synode, du 2 au 27 octobre
Les délégués synodaux avaient un document de travail élaboré à partir de la 1ère session, des travaux en région, et devaient travailler sur différents thèmes.
Élaboration du document final, que le pape promulgue immédiatement. Pas d’exhortation apostolique post-synodale (en toute logique, le pape n’est pas obligé de reprendre toutes les propositions d’un synode, par exemple le synode sur l’Amazonie). Là, le pape promulgue le jour de la sortie du document, en disant qu’il tient lieu d’exhortation apostolique.
Je vais essayer d’en dégager la trame de fond. Sans entrer dans les détails, mais pour comprendre l’esprit du document.
Le document peut être un peu subtil. Il n’a pas été rédigé par des dominicains, mais plutôt par des personnes dont la spiritualité est proche de la spiritualité ignacienne. Il faut le lire avec attention, plusieurs fois, et les explications données par l’évêque lors de différentes réunions m’ont été très éclairantes.

1. La mission

La préoccupation fondamentale du document est la mission. C’est à dire aider l’Église à remplir son rôle de diffusion de la bonne nouvelle.
Rappel : Le Kerygme, l’essentiel de l’annonce aux non-croyants (actes des apôtres, ou 1 Co 15) :
• Jésus-Christ est le Messie, le Fils de Dieu ;
• Il est mort et il est ressuscité, et celui qui parle en rend témoignage personnellement ;
• Il appelle à la conversion.
1ère partie du document final :

« L’Église existe pour témoigner au monde de l’évènement décisif de l’histoire : la résurrection de Jésus. Le Ressuscité apporte la paix au monde et nous donne son Esprit. Le Christ vivant est source de la vraie liberté, fondement d’une espérance inébranlable, et révélation tant du véritable visage de Dieu que de la destinée ultime de l’être humain. Les évangiles nous enseignent que, pour embrasser la foi pascale et en devenir témoins, nous devons d’abord reconnaitre notre vide intérieur, ainsi que les ténèbres de la peur, du doute et du péché. Mais ceux qui, dans l’obscurité, ont le courage de sortir et de se mettre en recherche, découvrent qu’en réalité c’est eux qui sont recherchés, appelés par leur nom, pardonnés et envoyés avec leurs frères et sœurs. »

Le document final n’est pas un changement dans l’organisation de l’Église ou dans la structure de l’Église.

2. Le baptême

Et donc, c’est quoi l’Église ? On va approfondir ce qui a été mis en exergue au concile Vatican II : l’Église c’est l’ensemble du peuple de Dieu, c’est à dire premièrement l’ensemble des baptisés.
1ère partie du document final :

« L’identité du peuple de Dieu découle du baptême au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Elle se réalise comme un appel à la sainteté et un envoi en mission pour inviter tous les peuples à accueillir le don du salut (cf. Mt 28, 18-19). Ainsi, l’Église synodale missionnaire trouve sa source dans le baptême, par lequel le Christ nous revêt de lui-même (cf. Ga 3, 27) et nous fait renaitre par l’Esprit (cf. Jn 3, 5-6) comme enfants de Dieu. »

Parce que je suis baptisé, je suis coresponsable et acteur de la mission. L’évêque parle beaucoup plus de coresponsabilité que de synodalité.

3. Sujet de l’écoute

En tant que baptisé, l’Esprit Saint me parle.
1ère partie du document final :

« Par le baptême, tous les chrétiens participent au sensus fidei »

C’est pourquoi l’Église souhaite compter sur moi pour discerner ce que l’Esprit peut dire. Car l’Église est un corps vivant, multiple, « vous êtes les membres les uns des autres » avec des sensibilités différentes, des charismes, des vocations, tout le monde est utile, et donc tout baptisé est « vecteur de l’Esprit Saint » (ELM)

4. Parvenir à l’unité

Mais cette capacité à être écouté ne signifie pas une capacité de revendication : car l’Esprit Saint conduit à l’unité. Car ce que l’Esprit Saint recherche, c’est l’unité du corps. Donc l’Esprit Saint parle à travers moi, mais sa parole conduit à l’unité.

« L’exercice du sensus fidei ne se confond pas avec l’opinion publique. Il est toujours lié au discernement des pasteurs aux différents niveaux de la vie ecclésiale, comme le montre l’articulation des phases du processus synodal. Il vise à atteindre le consensus des fidèles (consensus fidelium), qui constitue « un critère sûr pour déterminer si une doctrine ou une pratique particulière appartient à la foi apostolique »

5. Processus synodal

Donc le processus synodal est une reconnaissance de l’action de l’Esprit Saint, qui s’exprime à travers tous les baptisés, et qui doit permettre d’informer ceux qui ont le pouvoir de décisions. Ceux qui ont le pouvoir de décision ont l’obligation d’écouter les baptisés, car en vertu du baptême, l’Esprit Saint parle à travers eux. Ne pas tenir compte de cela serait aller à l’encontre des moyens ordinaires que l’Esprit Saint utilise pour diriger son Église.
Reconnaitre l’action de l’Esprit Saint à travers tous les baptisés, ce qui ne signifie pas que l’Église soit une démocratie.
1ère partie du document final :

« L’autorité des pasteurs « est un don spécifique de l’Esprit du Christ-Tête pour l’édification de tout le Corps » (CTI, n. 67). Ce don est lié au sacrement de l’ordre, qui configure ceux qui le reçoivent au Christ Tête, Pasteur et Serviteur, et les met au service du saint peuple de Dieu pour garder l’apostolicité de l’annonce et promouvoir la communion ecclésiale à tous les niveaux. La synodalité offre « le cadre interprétatif le plus approprié pour comprendre le ministère hiérarchique lui-même » (François, Discours en commémoration du 50e anniversaire de l’institution du Synode des évêques, 17 octobre 2015) ; elle place dans une juste perspective le mandat que le Christ confie, dans l’Esprit Saint, aux pasteurs. Elle invite donc toute l’Église, y compris ceux qui exercent une autorité, à la conversion et à la réforme. »

6. Indispensable formation

La 5e partie du document est consacrée à la formation des fidèles, (fidèles = tout le monde, car les prêtres sont aussi des fidèles)
• formation qualifiée d’intégrale pour être apte à l’annonce de l’Évangile,
• formation pour être apte à l’initiation chrétienne,
• formation à la synodalité.

7. Nécessaire conversion

Le mot conversion apparait 25 fois dans le document final. Il faut comprendre ce mot comme ce qu’il signifie : « se tourner vers » Se tourner vers Dieu.
La réflexion synodale ne signifie pas que tout ce qui a été fait avant est faux, ou qu’il nous faut radicalement changer : la conversion demande de notre part une ouverture d’esprit, afin de discerner de nouveaux éléments.
Conversion à tous les niveaux (simples fidèles, prêtres, évêques)

8. Quand ?

Quand cette dimension synodale va-t-elle s’exercer ?
Une partie complète du document est consacrée à cette question

9. Le discernement ecclésial pour la mission

Partie III. D’après le P. Christophe Delaigue, c’est la partie centrale du document : à lire sur le blog de Christophe Delaigue
Difficile de citer toute la 3ème partie…
Comment discerner en Église ?

« Dans l’Église synodale, « la communauté tout entière, dans la libre et riche diversité de ses membres, est convoquée pour prier, écouter, analyser, dialoguer, discerner et conseiller afin de prendre des décisions » (CTI, n. 68) pour la mission. Favoriser la participation la plus large possible de l’ensemble du peuple de Dieu aux processus décisionnels est le moyen le plus efficace de promouvoir une Église synodale »

L’outil proposé est la conversation spirituelle. Voir les documents fournis par le diocèse de Grenoble sur la conversation spirituelle.

10. Processus

On reste dans un cadre « hiérarchique », parce que l’Église n’est pas une démocratie.
L’autorité s’interroge, consulte, écoute, se repose sur la vie intérieure des fidèles, le sensus fidei, qui lui-même recherche l’unité, puis décide en tenant compte de ce à quoi les fidèles sont parvenus.
Cf. l’évêque :
• Vie intérieure des fidèles → sensus fidei
• Échange et consultation commune pour parvenir à une vision unitaire
• collégialité épiscopale
• Primauté de Pierre
Ce processus pose la question, à tous les niveaux, de la vie de prière des intervenants. Car il faut laisser parler l’Esprit. (ELM)

11. Ministères non ordonnés pour le service de la communauté

C’est dans un tel cadre certains que vont pouvoir recevoir de la communauté des « ministères non ordonnés »

« C’est dans un tel cadre de référence ecclésiologique que s’inscrit l’engagement à promouvoir la participation, sur la base d’une coresponsabilité différenciée. Il faut respecter chaque membre de la communauté, valoriser ses compétences et ses dons en vue d’une prise de décision partagée. »

Cf. Lectorat et acolytat
Lectorat : qui transmet la parole de Dieu (pas uniquement faire la lecture le dimanche)
Acolytat : serviteur de l’eucharistie
Je pense que l’idée est que, petit à petit, après avoir prié, ce soit la communauté qui désigne les personnes en charge de responsabilité pour une mission précise.
Cf. Il y a très longtemps, les évêques étaient désignés par acclamation du peuple. (Cf. saint Ambroise)
Ministères qui devront rendre compte.

« Des structures et des formes d’évaluation régulière de la manière dont les responsabilités ministérielles de toutes sortes sont exercées apparaissent également nécessaires »

12. Synodalité et organes de participation

Voir le document final

13. L’objectif n’est pas de donner un ministère à tous

C’est tout de même très important. (je regrette que cela ne soit pas plus clair)

« La mission implique tous les baptisés. La première tâche des laïcs, hommes et femmes, est d’imprégner et de transformer les réalités temporelles selon l’esprit de l’Évangile (cf. LG 31.33 ; AA 5-7). Le processus synodal, soutenu par une impulsion du pape François (cf. Lettre apostolique sous forme de Motu proprio Spiritus Domini, 10 janvier 2021), a exhorté les Églises locales à répondre avec créativité et courage aux besoins de la mission, en discernant parmi les charismes ceux qui doivent prendre une forme ministérielle, en se dotant de critères, d’instruments et de procédures appropriés »

14. Coresponsabilité et ministères différenciés

• Valoriser le baptême
• Valoriser les charismes et les compétences de chacun
• Valoriser les vocations, en particulier la vocation sacerdotale
Les prêtres sont ordonnés pour le service de la communauté, pour la sanctification du dimanche (cf. Homélie de l’évêque de la chandeleur), cf. le livre de l’évêque « Prêtres à l’école du lavement des pieds » mais certaines missions n’ont pas besoin de la fonction sacerdotale.
Tous les ministères sont au service de la communauté.
La communauté doit en garder les clés, car il ne s’agit pas de donner un pouvoir à une personne.
Cette dimension synodale permet à chacun de prendre conscience de son rôle, d’être impliqué selon ses capacités, charismes, etc.

15. Place de tous, en particulier des plus pauvres

Donner la parole aux plus pauvres. Régulièrement développé dans le document, et par l’évêque.

16. Suite…

• Temps nécessaire à la compréhension et à l’acceptation par tous
• Impulsion pour la mise en œuvre
• Formation (à tous les niveaux : le document parle de la formation des évêques)
• Explication (c’est ce que fait l’évêque)

17. Défis

• La vie intérieure, à tous les niveau
• Rester dans la dimension missionnaire et non organisationnelle
Cf. l’évêque lors de l’Université d’été : l’Église n’a pas à copier les entreprises. Notre dimension propre, c’est l’unité et le service.
Rappel du thème du synode : « Pour une Église synodale : communion, participation, mission »
• Communion des fidèles entre eux
• Participation à la mission de l’Église
• Mission d’annoncer l’évangile pour tous
• Opposition Sensus fidei (à développer) et donner la parole aux plus pauvres. C’EST POURQUOI IL FAUT ÉCOUTER ET DISCERNER

18. Vision d’ensemble

Réfléchir sur l’évolution proposée, et la remettre dans le contexte ecclésial :
• Désir indéniable de faire comprendre aux baptisés quelle est leur place et leur rôle dans l’Église. L’Église est hiérarchique mais elle n’est pas pyramidale. (bon, ça, j’avoue, c’est subtil. Ce que je veux dire, c’est qu’il y a une hiérarchie dans l’Église, mais que le discernement et les décisions ne doivent pas tomber du haut)
• Désir de recentrer la vocation sacerdotale sur l’essentiel, une mission au service de la communauté, et pas un chef d’entreprise.
• Mettre en place des « structures » pour que la questions des abus (sexuels ou spirituels) ne se reproduise plus.
• Le synode est une étape sur la pleine compréhension de ce qu’est l’Église, et de ce qu’à dit le concile Vatican II. Le synode n’est pas Vatican III.