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 2 juillet 2024

Le dernier match

De John Grisham, Éditions Robert Laffont, 2003

Nous sommes aux États-Unis d’Amérique, dans une petite ville du sud, Messina. (je n’ai pas réussi à la retrouver ni la situer en vrai). Neely Crenshaw est un ancien joueur de football (de football américain faut-il préciser, pas de « soccer »). Il fut l’un des héros de l’équipe, avant de partir jouer à l’université (et avant de perdre son genou au cours d’un match, lui empêchant désormais de pratiquer ce sport). Neely revient à Messina, après 15 ans d’absence. Eddie Rake, l’entraîneur mythique de l’équipe, est en train de mourir. Après tout ce temps, Neely revient le voir une dernière fois.

On découvre petit à petit l’histoire de Eddie Rake et de la ville. Eddie, l’entraîneur qui a mené cette équipe à gagner une série de plusieurs années sans défaite, qui a fait la gloire et la fierté de ses habitants, était, au fond, un homme odieux. Très dur, intransigeant, poussant les jeunes joueurs à l’extrême, parfois violent, et qui a forgé plusieurs générations de jeunes.

Les joueurs de la grande équipe se retrouvent, à quelques heures de la mort de leur entraîneur, et commencent à évoquer leurs souvenirs.

Le roman en tant que tel présente parfois quelques longueurs. En particulier, lorsque l’auteur repasse l’enregistrement d’un match mythique, et que nous revivons ce match à travers les paroles du journaliste commentateur. Un peu long, ai-je trouvé.
Mais la particularité du livre n’est pas dans le football : elle est dans une description sociologique typiquement américaine, que certainement nous ne connaissons pas en Europe, en tout cas en France. La question est posée : faut-il aimer ou faut-il haïr Eddie Rake ?

Car si certains le haïssent à cause de son comportement, de son attitude, d’autres lui trouvent des qualités. Sans la force de caractère de Rake, ils ne seraient jamais devenus ce qu’ils sont devenus.

L’un d’entre eux a survécu à une attaque au Vietnam parce qu’il s’est souvenu des mots très forts de Rake face à la défaite ; un autre, qui a détruit sa jeunesse en vendant de la drogue, et ruiné ses parents, a tenu le coup en prison parce que Rake est venu – lui seul – au procès pour l’accompagner. Un autre, homosexuel (ce qui, dans les années 50 dans le sud des États-Unis, n’était pas bien vu) a été encouragé par Rake pour « être lui-même ». Enfin, Rake a réussi à intégrer les noirs à l’équipe, car pour lui, la couleur de peau n’avait pas d’importance : tout le monde était traité à la même enseigne. Grâce à Rake, un quatrième est devenu pasteur noir dans sa communauté.
Évidemment, Rake pourrait être haï, car ses entraînements ont eu des conséquences dramatiques (mais je ne vais pas spoiler l’histoire…). De fait, Crenshaw ne partage pas du tout l’enthousiasme de certains de ses anciens partenaires. Néanmoins, il sera là, et fera l’un des discours le jour de l’enterrement.

Étude sociologique très intéressante. Qui plus est, très crédible, car lorsqu’on lit la biographie de Steve Jobs, on se rend compte que ces collaborateurs ont les mêmes sentiments à son égard. Faut-il aimer ou haïr Steve Jobs ?